Abrogation d’une mesure antidumping: les producteurs de bioéthanol font grise mine
Les producteurs français de bioéthanol ont déploré mercredi la suppression par Bruxelles de droits antidumping sur l’éthanol américain, de nature à « fragiliser » le secteur, soumis selon eux à des « pratiques commerciales déloyales » de la part des Etats-Unis.
« La Commission a conclu qu’il était peu probable que les producteurs américains de bioéthanol exportent des quantités importantes de bioéthanol vers l’Union à des prix de dumping en cas d’expiration des mesures », et a donc décidé d’abroger ces mesures, indique-t-elle dans sa décision, consultée par l’AFP.
La filière française du bioéthanol, pour sa part, « ne comprend pas que la Commission baisse la garde face aux pratiques commerciales déloyales du premier producteur mondial, alors que le secteur doit faire face à de multiples menaces ».
« Cela aura pour conséquence de fragiliser l’ensemble de la filière de l’éthanol européen, représentant 55.000 emplois directs et indirects dans l’Union européenne, dans l’agriculture, l’industrie et les services », déplorent dans un communiqué conjoint, les producteurs de blé, de betteraves et de maïs, matières premières de l’éthanol, ainsi que les industriels.
La production américaine, « essentiellement issue de maïs OGM résistant au glyphosate et qui utilise intensément du gaz de schiste comme source d’énergie, réduit moins les émissions de gaz à effet de serre que la production européenne », arguent les producteurs français.
En outre, la production des Etats-Unis « représente la moitié de la production d’éthanol mondiale et ses excédents exportés sont de la taille de la totalité de la demande européenne de bioéthanol dans les carburants », ajoute-t-elle pour appuyer la menace que représente cette concurrence.
Alors que ces volumes, sont, selon les producteurs français, aujourd’hui dirigés vers des marchés tels que le Brésil, la Chine, le Pérou et la Colombie, la mise en place par ces pays de « mesures de protection » contre les exportations d’éthanol américain, entraine « un risque sérieux » qu’elles soient redirigées vers l’Europe, au moment même où « le secteur du sucre traverse une crise profonde ».
Par ailleurs, les producteurs de bioéthanol craignent de nouvelles concessions au profit du Brésil, deuxième producteur mondial après les Etats-Unis, dans le cadre des discussions sur l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur.
Ces inquiétudes surviennent alors que les ventes d’essence contenant jusqu’à 85% de bioéthanol (E85) ont vu leurs ventes décoller l’an dernier grâce aux premières homologations de boîtiers de conversion pour les voitures.
Sur l’ensemble de 2018, les ventes de ce carburant, moins polluant et moins cher, ont bondi de 55% pour atteindre 2,3% de part du marché des essences (hors diesel), selon la Collective du bioéthanol.