Baisse des émissions de CO2 : malgré de bons résultats, la France peut mieux faire
La Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC) vise à guider la France dans la manière de mener sa stratégie climatique et atteindre ses objectifs de lutte contre le réchauffement climatique. Véritable feuille de route de notre transition écologique, elle précise en effet secteur par secteur les actions à mettre en place pour atteindre d’ici l’horizon 2050 la neutralité carbone.
Afin de suivre et d’évaluer les résultats de l’action climatique française, le Réseau Action Climat et le CLER-Réseau pour la transition énergétique lancent en 2017 l’Observatoire Climat-Énergie.
Cet outil a pour objectif de dresser annuellement un état des lieux de la transition énergétique et climatique française : il s’agit d’évaluer de manière neutre les écarts éventuels entre les objectifs poursuivis et les résultats atteints, afin d’identifier les domaines pour lesquels des mesures complémentaires sont nécessaires.
Dans le bilan 2018 de l’Observatoire Climat-Énergie, les résultats montrent une nette diminution des émissions de gaz à effet de serre. Cette tendance doit absolument s’accélérer pour atteindre en temps et en heure les objectifs fixés par la SNBC.
Une baisse nette mais qui reste en dessous des objectifs
De prime abord, les résultats du dernier bilan de l’Observatoire Climat-Énergie semblent particulièrement engageants. Après trois années consécutives de hausse, les émissions françaises de gaz à effet de serre s’inscrivent enfin à la baisse : entre 2017 et 2018, les émissions polluantes de notre économie ont en effet diminué de 4,2%.
« L’année 2018 est une année de rupture à plusieurs égards. Elle est la première année de baisse des émissions globales de la France depuis 2014 : nous n’avons jamais aussi peu émis de gaz à effet de serre au 21ème siècle. Et pour la première fois depuis 2014, le niveau d’émissions de gaz à effet de serre provenant du secteur des transports est également en baisse », se félicite le ministère de la Transition écologique et solidaire dans un communiqué.
Cette diminution de nos émissions de gaz à effet de serre est bien évidemment une bonne nouvelle pour la planète. Mais elle cache cependant une autre réalité : la France n’a pas respecté ses engagements climatiques.
Les émissions polluantes françaises ont en effet dépassé de 4,5% le quota défini par la SNBC. En d’autres termes, la France a émis 19,1 mégatonnes de CO2 de plus que prévu par le budget carbone qu’elle a elle-même défini dans le cadre de sa stratégie climatique.
Du côté des bons élèves : la transformation d’énergie et l’industrie
Parmi les bons élèves figure en première ligne le secteur de la transformation d’énergie qui affiche des émissions polluantes à la baisse de 15% entre 2017 et 2018. Les volumes de gaz à effet de serre sont ainsi inférieurs de 17% aux objectifs annuels que s’est fixée la France.
Grâce à un mix électrique particulièrement décarboné, ces résultats sont particulièrement bons dans le domaine de la production d’électricité. La SNBC avait fixé son objectif 2018 à 40 grammes de CO2 émis par kilowattheure produit. Un objectif largement atteint : le bilan carbone de l’électricité produite en France en 2018 n’a pas excédé 36 grammes de CO2 par kilowattheure.
Le secteur de l’industrie affiche également de bons résultats. Les chiffres publiés par l’Observatoire Climat-Énergie témoignent en effet d’une baisse de 2,8% des émissions de CO2 entre 2017 et 2018. Le budget carbone est légèrement dépassé (+0,6%) mais les industriels hexagonaux peuvent se féliciter d’être « globalement dans les clous ».
Du côté des cancres : le transport et le bâtiment
Le transport est réputé pour être un secteur fortement énergivore en raison des volumes astronomiques de matières fossiles polluantes qu’il contribue à consommer. Une triste réputation à laquelle il n’a pas failli. Le transport a en effet plombé une fois de plus le bilan carbone de la France : il est à lui tout seul responsable de 31% des émissions polluantes de notre pays.
Les émissions globales du secteur des transports ont légèrement baissé entre 2017 et 2018 (-1,6%) mais restent largement au-dessus (+12,6%) des objectifs que s’est fixé notre pays.
L’autre mauvais élève est sans conteste le secteur du bâtiment qui est à l’origine de 20% des émissions de CO2 françaises. Comme pour le transport, les émissions s’inscrivent à la baisse entre 2017 et 2018 (-6%, en raison d’un hiver clément) mais restent largement en-dessous des objectifs fixés par la SNBC (-14,5%).
L’Observatoire Climat-Énergie estime que la rénovation énergétique du bâtiment est insuffisante d’un point de vue qualitatif (les travaux efficaces sont peu nombreux) mais également quantitatif (aucune statistique n’existe mais l’objectif des 500.000 rénovations par an que s’est fixé le gouvernement est loin d’être atteint).
« Les émissions supplémentaires de 2018 sont autant de gaz à effet de serre en plus dans l’atmosphère qui nécessitent des baisses fortes dans les années à venir et/ou une augmentation de l’absorption par les puits de carbone », estiment les auteurs du bilan.
Le message envoyé par l’Observatoire Climat-Énergie est plutôt clair : il est désormais nécessaire de faire preuve de plus d’ambition dans les secteurs les plus polluants de notre économie. Reste à voir jusqu’où est prêt à aller le gouvernement.
COMMENTAIRES
OK pour les progrès dans le secteur de la production d’énergie, grâce essentiellement au parc nucléaire d’EDF.
Mais le cocorico concernant le secteur de l’industrie est malvenu : nos « bonnes » performances sont l’image de la désindustrialisation croissante de notre pays, qui sera bientôt relégué au rang de pays émergent si notre gouvernement n’a pas le courage de lancer de vraies réformes. Si l’on prenait en compte les produits industriels d’importation consommés en France, alors notre « bon » résultat serait moins reluisant.
A-t-on mesuré l’efficacité des aides publiques pour la rénovation énergétique ? Il semblerait que non ! Que d’argent public dépensé en pure perte alors que tant d’autres secteurs en auraient besoin !