Quels bénéfices économiques pour l’électrification des transports routiers européens ?
En raison de son caractère énergivore et de son bilan carbone particulièrement mauvais, le transport est un secteur clé pour favoriser la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la décarbonation de notre économie.
Le transport routier de marchandises est responsable à lui seul de 22% des émissions de gaz à effet de serre du secteur européen des transports.
Pourtant, la flotte de poids-lourds en charge du transport des produits de consommation qui s’échangent quotidiennement en Europe ne représente que 5% des véhicules en circulation.
Il ne fait donc aucun doute que l’électrification des poids-lourds qui circulent sur les routes du Vieux Continent est un des enjeux majeurs pour la réussite de la transition énergétique de l’Union Européenne.
Un rapport publié par le cabinet de conseil Cambridge Econometrics estime même que la décarbonation des poids-lourds européens représente un enjeu économique. Explications.
L’UE travaille à une législation plus contraignante
Le transport routier de marchandises est essentiel au développement économique de l’Union Européenne : les poids-lourds représentent près de 70% des moyens de transport de marchandises par voie terrestre et assurent la pérennité de plus de 3 millions d’emplois.
Malheureusement, ce secteur est également responsable de 6% des émissions de gaz à effet de serre totales de l’UE (et de 22% des émissions du secteur du transport routier).
« Les transports sont le seul secteur dans lequel les émissions de CO2 de l’UE sont aujourd’hui supérieures à celles de 1990. Ce fardeau devient de plus en plus lourd à mesure que l’Europe s’efforce de s’acquitter de ses obligations pour le climat imposées par l’Accord de Paris. Les politiques se concentrent de plus en plus sur les émissions dans le secteur des transports et les villes appliquent des interdictions de circuler aux véhicules utilisant des carburants fossiles, tandis que les consommateurs toujours plus sensibles à ces questions exigent des services sobres en carbone. Les transports par camions roulant au diesel créent donc un besoin urgent de changement », explique Erik Wirsing, Vice-président Innovation mondiale chez DB Schenker.
La Commission Européenne estime qu’en l’absence de mesures concrètes, les émissions de gaz à effet de serre des véhicules lourds devraient augmenter de 9% d’ici l’horizon 2030 en raison de l’augmentation des activités du transport.
Cette prévision est en totale contradiction avec l’engagement pris par l’UE de diminuer ses émissions polluantes pour contenir le réchauffement de la planète en dessous de 2°C d’ici la fin du siècle (Accord de Paris pour le Climat).
Un nouveau règlement présenté en mai dernier vise donc à encadrer les émissions de CO2 des poids-lourds européens, en établissant de nouvelles normes de performances.
Ainsi, les « nouveaux véhicules lourds » mis en circulation dans les pays membres de l’UE devront présenter à partir du 1er janvier 2025 des émissions de dioxyde de carbone inférieures à 15% aux niveaux de 2005.
Des bénéfices économiques non négligeables
Cette nouvelle législation est actuellement débattue au sein des diverses institutions de l’UE.
Soucieux d’en accélérer l’adoption, un rapport de la Fondation européenne pour le climat et le cabinet Cambridge Econometrics vient soutenir les bénéfices de l’encadrement des émissions de CO2 des poids-lourds.
Selon le rapport « Le transport routier pour un avenir plus vert », la réduction des émissions du secteur européen du transport routier ne représente pas qu’une opportunité environnementale : l’électrification des poids-lourds permettrait également de soutenir la croissance économique européenne.
En favorisant la démocratisation des moteurs électriques et des carburants moins polluants, l’UE pourrait par exemple réduire d’un milliard d’unités ses importations de barils de pétrole d’ici l’horizon 2030.
À plus long terme, c’est-à-dire d’ici 2050, ces bénéfices sont évalués à 11 milliards de barils de pétrole cumulés.
Réduire le recours aux produits pétroliers permettra donc à l’Europe de diminuer sa dépendance aux importations, de couper ses émissions polluantes mais surtout de renforcer son indépendance énergétique. Les bénéfices économiques de cette transition et du basculement vers des poids-lourds à faible émission entraineront également la création de plus de 120.000 emplois nets.
« Cette analyse démontre que la transition vers un fret économe en carbone comporte des avantages pour l’économie européenne, en plus des avantages environnementaux évidents. La réduction des importations de pétrole et l’augmentation de la demande de carburants produits sur le territoire de l’UE créeront des emplois européens. Toutefois, il est évident que la transition a besoin d’être soutenue, afin de garantir que des infrastructures appropriées sont développées, que des normes communes sont développées et que les défis auxquels font face les transporteurs sont surmontés », estime Jon Stenning, Directeur associé chez Cambridge Econometrics.