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EDF pointé du doigt par la Cour des comptes : pourquoi ne voir le verre qu’à moitié vide ?

Coupable d’une politique salariale encore trop généreuse aux yeux de la Cour des comptes, EDF contre-attaque en mettant en avant les progrès réalisés ces dernières années.

Le groupe dirigé par Jean-Bernard Lévy fait également valoir ses efforts pour moderniser son modèle managérial et social, tout en préservant une forte ambition vis-à-vis de ses personnels.

Alors que syndicats et gilets jaunes ont uni leurs forces le 5 février pour réclamer une hausse des salaires, le rapport 2019 de la Cour des comptes publié le lendemain s’inquiète ouvertement des rémunérations trop élevées et des avantages excessifs accordés aux 66 000 agents d’EDF.

Sur la période 2012-2017, les « sages » de la rue Cambon reconnaissent certes du mieux dans le ralentissement de la progression des dépenses de personnel (+2,3 % par an, contre +5,7 % entre 2007 et 2011), mais ils pointent encore du doigt une politique salariale et sociale trop généreuse au regard d’une « situation économique et financière de l’entreprise [qui] s’est nettement dégradée », selon eux.

Dans ses recommandations, la Cour demande à l’énergéticien de moderniser « rapidement et en profondeur son système de rémunération », notamment en accroissant la part variable, et de supprimer certains avantages comme l’accès au parc de logements et à un tarif préférentiel pour l’électricité. Elle remet ainsi en cause l’application encore majoritaire du statut du personnel des industries électriques et gazières (IEG) adopté en 1946, quand EDF n’était pas encore une société anonyme…

Dans un courrier de réponse envoyé mi-décembre 2018 avant la publication de ce rapport, Jean-Bernard Lévy, à la tête d’EDF depuis 2014, retient plusieurs points positifs dans l’analyse proposée par la Cour.

S’il admet que la masse salariale globale a continué à progresser, il met en avant l’importante fonte des effectifs – moins 5 600 postes entre 2015 et 2018 –, le gel historique du salaire national de base en 2017 et la convergence progressive du système de retraite avec celui du régime général.

Le ralentissement de la progression des salaires se serait en outre accompagné d’un plus fort recours à la rémunération de la performance, en adéquation avec les résultats de l’entreprise. Le numéro un du groupe insiste également sur la rénovation en cours du modèle social, qui a dû s’adapter à une évolution majeure de son environnement avec l’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité en 2007.

Dans ce contexte nouvellement concurrentiel, Jean-Bernard Lévy reconnaît que cette démarche de modernisation du cadre social doit se poursuivre, mais qu’il convient d’atteindre un équilibre afin de répondre à une ambition sociale élevée pour les agents du groupe.

Le PDG souligne en effet le fort niveau d’engagement des salariés, garants de la qualité du service sur l’ensemble du territoire et, par extension, de sa tarification compétitive ainsi que de son rôle majeur dans la transition énergétique et la lutte contre le réchauffement climatique.

Aussi appelle-t-il l’État à plus de soutien et de temps pour mener à bien ces chantiers et mesurer les résultats dans la durée, en concertation avec les pouvoirs publics et les partenaires sociaux.

Des conclusions accueillies avec réserves par les ministères

La direction d’EDF n’a en effet pas attendu le rappel à l’ordre de la Cour des comptes pour moderniser son cadre statutaire en matière de rémunération, d’avantages sociaux et de management.

À travers son plan CAP 2030 lancé en 2015, elle s’est notamment fixée six objectifs de responsabilité d’entreprise portant sur le climat et le carbone, le développement humain, les offres commerciales, l’efficacité énergétique, le dialogue et la concertation ainsi que la préservation de la biodiversité.

Pour accompagner cette évolution et expliciter la transformation du monde de l’énergie, le groupe a créé avec le soutien du média spécialisé Usbek & Rica un Conseil des générations futures, qui réunit salariés et participants extérieurs issus des secteurs de l’énergie, de l’économie et de la transition écologique autour de débats aux enjeux techniques, scientifiques, citoyens et environnementaux.

En 2018, EDF a également lancé l’opération Parlons énergies afin d’impliquer directement, via une plate-forme participative, les agents dans la réflexion sur les débats d’actualité et la stratégie globale du groupe. Pour Jean-Bernard Lévy, l’autre objectif de cette démarche consiste à accélérer la transformation du management de l’entreprise, encore trop pyramidale à son goût.

Devant les remarques des sages de la rue Cambon, les ministères de l’Économie et de la Transition écologique et solidaire ont préféré faire preuve de réserve au moment de prendre acte des différentes conclusions.

« Ce sujet fait l’objet d’une sensibilité particulière dans un contexte sociale global tendu », a-t-on réagi à l’Hôtel de Roquelaure. François de Rugy a rappelé qu’il revenait à EDF et ses partenaires sociaux de négocier le sujet de la rémunération.

Même écho du côté de Bercy, où l’on analyse les recommandations dans « une perspective à moyen terme ». Bruno Le Maire défend même les dispositions de rémunérations complémentaires, « qui compensent certaines situations au travail ».

Rappelons que Radio France, les trains Intercités de la SNCF, le Mobilier national (MNGBS), l’AFPA, l’université de Lille, le milieu hospitalier, les territoires d’outre-mer, la Mairie de Bobigny et même Ariane 6 s’ajoutent la longue liste des entités à être égratignées cette année.

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