Énergie solaire en Afrique, un avenir rayonnant ?
Par Benjamin Fremaux, Senior Fellow énergie à l’institut Montaigne et Antoine Huard, président du think tank France Territoire Solaire et directeur international du groupe Générale du Solaire.
L’Afrique verra sa population doubler en 30 ans pour atteindre 2,5 milliards d’habitants en 2050. Le rythme actuel de mise en service de nouvelles capacités de production d’électricité en Afrique est inférieur à la croissance démographique.
Par conséquent, le nombre de personnes dépourvues d’accès à l’électricité (645 millions d’Africains) continuera mécaniquement à augmenter au moins jusqu’en 2025 voire 2040.
Une accélération du rythme de développement de la production d’électricité est indispensable
L’électricité produite à partir d’énergie solaire photovoltaïque représente une solution prometteuse, grâce à sa compétitivité tout d’abord, mais aussi à sa simplicité de fonctionnement qui va de pair avec une grande rapidité de construction.
Le continent africain bénéficie d’un ensoleillement privilégié. Le solaire photovoltaïque s’adapte à toutes les réalités du terrain : du kit solaire équipant un foyer isolé, jusqu’à la gigantesque ferme solaire alimentant des villes entières.
Enfin, il peut fonctionner hors réseau, et donc alimenter immédiatement des populations rurales isolées sans attendre le déploiement souvent long et coûteux des réseaux de transport et de distribution d’électricité.
Les systèmes individuels ou hors réseaux ne pourront, seuls, répondre aux enjeux
La demande d’électricité est en forte croissance dans les villes, où la densité de population, la vie en habitat collectif, et la consommation d’électricité par habitant plus importante, ne permettent pas à des kits solaires de couvrir en totalité les besoins.
Des centrales solaires de plus grande puissance raccordées aux réseaux sont donc nécessaires. Pourtant, à ce jour, un nombre insignifiant de projets de ce type ont été concrétisés en Afrique.
Ce travail vise à identifier les raisons principales pouvant expliquer cet échec :
- Les outils actuels de financement et de couverture des risques ne sont pas adaptés au caractère très capitalistique et à la petite taille des centrales solaires. L’essentiel de leur coût étant concentré sur l’investissement initial, qui s’amortit ensuite sur plusieurs décennies, les projets solaires nécessitent une visibilité de long terme sur leurs revenus pour pouvoir être financés dans de bonnes conditions. En Afrique comme ailleurs, les entreprises souhaitant investir dans des centrales solaires ont donc besoin de certaines garanties et d’outils de financement spécifiques. Or, les solutions disponibles aujourd’hui présentent un coût et une complexité qui les rendent incompatibles avec la spécificité des centrales solaires, notamment leur petite taille.
- Le recours quasiment systématique aux appels d’offres afin d’identifier et de sélectionner les projets solaires soulève certains problèmes. D’une part, la lourdeur des procédures, disproportionnée par rapport à la taille de la plupart des projets, conduit à un allongement des délais et une augmentation des coûts. D’autre part, anticipant les baisses de prix des panneaux solaires et la pression concurrentielle, les candidats sont incités à sous-enchérir, de manière à ce que dans de nombreux cas les projets lauréats ne soient pas viables économiquement et ne voient jamais le jour.
- La politique de subventions menée sans discernement par quelques États et banques de développement engendre des distorsions de marché. Les initiatives subventionnées dans le domaine de l’énergie solaire ont des effets collatéraux néfastes : elles fixent des prix de référence inatteignables sans subventions, rendant ainsi irréalisable tout autre projet financé sur fonds privés dans la région. Ce faisant, elles dissuadent les développeurs privés de continuer à prendre des risques en entreprenant de nouveaux projets dans ces pays.
Endiguer la hausse globale des émissions de CO2 nécessite que la satisfaction d’une demande d’électricité africaine en forte croissance et l’accès à l’électricité des 650 millions d’Africains qui en sont aujourd’hui dépourvus, soient menés à bien par des technologies décarbonées.
Sans minimiser l’importance de réduire les émissions de CO2 en France (1,2% des émissions mondiales) ou en Allemagne (2,7% des émissions mondiales), la priorité absolue d’une politique climatique globale devrait également viser à éviter les émissions futures considérables qui résulteraient de la seule adoption massive de moyens de production thermiques pour alimenter les 2,5 milliards d’habitants qui vivront en Afrique en 2050.
Les réponses aux défis climatique et démographique du continent africain, sans doute les plus importants du XXIème siècle, ont un dénominateur commun : le déploiement rapide, à très grande échelle, d’une électricité décarbonée et économiquement accessible.
L’énergie solaire est aujourd’hui le principal vecteur à notre disposition à pouvoir remplir toutes ces conditions en Afrique. La levée des freins identifiés dans cette note est le prérequis indispensable pour que cette énergie puisse enfin apporter une contribution à la hauteur de son immense potentiel.
L’étude complète est à lire ici
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