Des chercheurs suisses mettent au point des cerfs-volants producteurs d’électricité
Parmi les start-up qui se lancent dans le développement de turbines éoliennes en haute altitude, une jeune pousse suisse va tester un nouveau prototype… sous forme de cerf-volant. L’énergie éolienne aéroportée permettrait en effet de réduire l’empreinte visuelle des turbines classiques mais surtout d’exploiter la puissance des courants d’air d’altitude. Explications.
Exploiter la force du vent en altitude
Le vent est un déplacement horizontal de l’air produit par la différence de pression atmosphérique entre deux points. Sa vitesse peut être mesurée selon treize niveaux, définis par l’échelle de Beaufort. Cet instrument permet notamment de constater que la force et la constance des rafales de vent varie en fonction de différents critères, parmi lesquels l’altitude.
« En règle générale, la vitesse du vent augmente avec l’altitude. En effet, l’écoulement de l’air près du sol est freiné par les obstacles constitués par le sol, les reliefs, les immeubles ou les forêts (…). Lorsque l’air est stable, les variations en fonction de la hauteur tant en direction qu’en force peuvent être très importantes même entre le sol et le toit d’un immeuble par exemple », explique Météo-France.
Les chercheurs suisses du Laboratoire fédéral d’essai des matériaux et de recherche (Empa) travaillent depuis 2013 à la création d’un système de production d’énergie éolienne capable d’exploiter ces vents d’altitude.
Et après plusieurs années de recherche et développement, leur premier prototype d’éolienne aéroportée, qui répond au nom de TwingTec, est enfin prêt pour prendre son envol.
L’Empa met au point un cerf-volant producteur d’électricité
Il aura fallu un peu moins de cinq ans à l’équipe de l’Empa pour mettre au point un prototype fonctionnel de « cerfs-volants producteurs d’électricité ».
Dès les prémices du projet, l’objectif était de valoriser énergétiquement la force des rafales de vent qui se forment à 500 mètres d’altitude. Là-haut, le vent souffle en effet jusqu’à quatre fois plus fort qu’à 120 mètres (hauteur des éoliennes actuelles).
Après plusieurs essais, les chercheurs ont décidé de s’orienter vers la conception d’une structure à ailes rigides reliée à un générateur électrique par un filin à tambour. Le TwingTec était né.
Concrètement, le fonctionnement de cet engin se base sur des cycles de vols ascendants : la structure rigide se fait emporter vers le ciel dans un mouvement hélicoïdal qui fait se dérouler petit à petit le filin à tambour. Ce dernier actionne tout au long de son ascension la turbine du générateur, produisant ainsi une électricité renouvelable.
Une fois le filin entièrement déroulé, le « cerf-volant » continue d’être entrainé par la force du vent : il redescende pendant que le filin s’enroule à nouveau autour du tambour. Une fois arrivé au niveau du sol, le dispositif reprend son cycle ascendant.
« Le grand défi n’est pas le vol en soi mais l’automatisation du décollage et de l’atterrissage », explique Rolf Luchsinger, le directeur du projet TwingTec qui occupe neuf collaborateurs au sein du siège de l’Empa à Dübendorf, dans le canton de Zurich.
Vers la commercialisation prochaine du TwingTec ?
La technologie TwingTec a été éprouvée avec succès à l’automne 2018. L’équipe de Rolf Luchsinger a réussi à faire décoller et générer de l’électricité au TwingTec T 28 : ce prototype de 3 mètres d’envergure a en effet produit de l’électricité pendant 30 minutes lors d’un vol d’essai effectué au-dessus du Chasseral, un sommet du Jura suisse situé dans le canton de Berne.
Le prochain TwingTec, le T 29, devrait décoller dans les prochaines semaines avec pour objectif principal la production d’un courant continu sur une « longue durée ».
L’équipe de l’Empa estime que ce nouveau prototype sera en mesure de décoller et d’atterrir de manière automatique, tout en générant 10 kW d’énergie injectable sur le réseau électrique.
Rolf Luchsinger compte sur l’expérience acquise avec ces deux vols d’essai pour finaliser la version finale du TwingTec. Baptisée TT100, cette version commercialisable prendra la forme d’un cerf-volant de 15 mètres d’envergure capable de délivrer en tout autonomie 100 kW de puissance électrique.
De quoi répondre aux besoins électriques d’une soixantaine de maisons individuelles.
« Notre éolienne n’est pas destinée aux régions densément peuplées. Nos clients potentiels, ce sont les mines, les communautés isolées, les îles. Autant d’endroits qui utilisent actuellement des générateurs diesel bruyants, polluants et dont le carburant doit être acheminé au prix fort », explique M. Luchsinger.
De par les caractéristiques de son innovation, l’Empa pourrait bien évidemment constituer une véritable ferme éolienne en combinant l’action de plusieurs de ses TwingTec. Mais Rolf Luchsinger est d’ores-et-déjà en train de penser à l’étape suivant : l’installation de parcs flottants de cerfs-volants en zone maritime.
Le vent y souffle également avec beaucoup de force et la place disponible ne manque pas… Les conditions semblent donc idéales pour produire de l’énergie renouvelable et atteindre les objectifs de notre transition énergétique.
Crédit photo : Empa
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