La facture énergétique flambe : les annonces d’Elisabeth Borne en questions
Une tribune signée Matthieu Toret, avocat spécialisé en fiscalité énergétique et environnementale, associé fondateur du cabinet Enerlex.
En réaction à la hausse massive des prix de l’électricité et du gaz, la Première ministre Elisabeth Borne a dévoilé, le 14 septembre 2022, sa feuille de route en matière énergétique, dont l’objectif est d’aider les ménages et les entreprises à faire face à cette situation exceptionnelle.
Parmi les mesures annoncées, le gouvernement propose de prolonger l’application du bouclier tarifaire et de rembourser partiellement la facture de gaz et d’électricité des entreprises intensives en énergie.
La prolongation du bouclier tarifaire
Pour rappel, l’objectif du bouclier tarifaire est de limiter la hausse du prix de l’électricité à 4% par rapport à son niveau du 31 octobre 2021. Pour ce faire, le Gouvernement a d’abord utilisé le levier fiscal en réduisant drastiquement le tarif de la principale taxe pesant sur l’électricité : la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) dont le tarif de droit commun est passé de 22,5 euros, à 1 euro par MWh vendu aux ménages et à 0,5 euro par MWh vendu aux professionnels. Cette quasi- suppression de la TICFE doit, normalement, prendre fin le 31 janvier 2023…
Lors de sa conférence de presse, Elisabeth BORNE a également annoncé la prolongation en 2023 du bouclier tarifaire, tout en indiquant que le prix de l’électricité devrait augmenter de 15%. Il ne s’agit donc plus du maintien du bouclier tarifaire initial plafonnant la hausse à 4% par rapport à son niveau d’octobre 2021. Effectivement, le Gouvernement était probablement loin d’anticiper qu’en décidant de presque supprimer la TICFE, cela ne suffirait pas à neutraliser l’envolée des prix. En plus, de s’être privé, probablement pour longtemps, d’une recette, le levier fiscal est dorénavant presque inutilisable…
Il n’a pas été précisé le futur périmètre d’application de la prolongation du bouclier tarifaire et de la baisse de la TICFE. Ces mesures s’appliqueront-elles à tous les ménages ? Aux seuls ménages considérés comme modestes ? Les entreprises pourront-elles en bénéficier ? Quid des entreprises intensive en énergie ? Le fioul sera-t-il également financièrement aidé alors qu’il est écologiquement combattu par le gouvernement ? Le maintien de ces mesures en faveur de la majorité des ménages semble acquis, mais la Première Ministre n’a pas indiqué si, par exemple, la baisse de la TICFE continuerait à s’appliquer aux entreprises de grandes tailles et énergivores. Ce point est crucial, lorsque l’on observe que des entreprises décident de mettre à l’arrêt leurs lignes de production, non pas faute de débouchés commerciaux ou faute de personnels, mais en raison de la seule hausse du prix de l’énergie.
Ces questions seront débattues durant les discussions sur le projet de loi de finances pour 2023. Les débats promettent d’être vifs, par exemple sur le chèque énergie qui devrait être attribué aux foyers modestes et/ou ruraux et sur la suppression de la ristourne sur les carburants.
Le remboursement partiel de la facture de gaz et d’électricité
Un décret du 1er juillet 2022 permet aux entreprises d’obtenir le remboursement partiel de leurs factures d’électricité et de gaz couvrant la période allant de février à août 2022. Pour obtenir ce remboursement, une entreprise doit justifier des 3 critères suivants : ses achats de gaz et d’électricité ont représenté au moins 3% de son chiffre d’affaires en 2021 ; elle a subi un doublement de sa facture énergétique en 2022 (par rapport à 2021) ; son excédent brut d’exploitation a baissé d’au moins 30 % en 2022 (par rapport à 2021).
Généreux, le Gouvernement avait provisionné 3 milliards d’euros pour alimenter ce fonds destiné à aider les entreprises intensives en énergie. Mais, dans la pratique, les critères retenus par le Gouvernement étaient tellement restrictifs que très peu d’entreprises ont pu en bénéficier, si bien que le fonds n’a utilisé que 500.000 € de cette enveloppe… Cette erreur de calibrage a été reconnue par Bruno Le Maire qui a indiqué, le 14 septembre 2022, que le dispositif devait être revu « de fond en comble » car « trop complexe et qui aujourd’hui ne fonctionne pas ». En effet, les entreprises ont peiné à démontrer que leurs achats de produits énergétiques représentaient au moins 3% de leur chiffre d’affaires en 2021, alors que les prix du gaz et de l’électricité n’avaient pas encore augmenté dans des proportions considérables, puis à justifier le critère de la baisse d’au moins 30 % de l’excèdent brut d’exploitation qui était presque exclusif.
Un décret rectificatif paraitra dans les semaines qui viennent. Celui-ci est très attendu des entreprises qui espèrent un réel assouplissement de ces critères et redoutent que le gouvernement n’opère que des ajustements à la marge, alors qu’il y a urgence….
COMMENTAIRES
nos politiques nous mettent danns la merde volontairement , envoyez vos factures EDF et Gazoil à Macron , le fautif se reconnaitra , et dire qu’ils sortent des grandes écoles que l’état français leur a payé , ils ne sont pas cons , votre pauvreté est désirée , merci macron
Sachant que le financier du bouclier tarifaire, c’est le contribuable, et le contribuable c’est nous ! Je partage, notre pauvreté est bien programmée.
Dans cet ouvrage de haut niveau, débat intéressant sur ce qui nous attend avec tout cet argent magique qui tombe du ciel et qui endettera durablement les prochaines générations : https://www.culture-tops.fr/critique-evenement/essais/la-dette-potion-magique-ou-poison-mortel
L’histoire économique nous montre pourtant que le trio infernal dette publique + inflation + augmentation des taux d’intérêt est la recette parfaite pour une récession économique. Il est donc urgent de cesser la politique du « quoi qu’il en coûte, des chèques et aides de tout poil ». Il en va de l’avenir de notre pays.
Aux dernières nouvelles, la charge de la dette publique (au taux d’intérêt de 2,5 % l’an) atteindra cette année 60 milliards d’euros. Et les prochaines années, ce sera pire.
Et la France court de record en record concernant les emprunts et la dette publique : https://www.lepoint.fr/economie/la-france-va-contracter-un-emprunt-record-en-2023–26-09-2022-2491355_28.php