Le GNV peut-il être une alternative au tout électrique pour décarboner les transports ?
Article signé Annabelle Sibué et Aurélien Martin pour SpinPart.
La question de la mobilité est au cœur de la Transition Energétique (TE). Alors que les fabricants et les consommateurs se tournent massivement vers le véhicule électrique, le GNV (Gaz Naturel pour Véhicules) apparaît comme une alternative durable pour les transports avec l’émergence du biométhane utilisé comme carburant.
La loi de Transition Energétique pour une Croissance Verte (LTECV) impose à l’Europe des objectifs significatifs en termes de réduction des Gaz à Effet de Serre (GES), avec une diminution de 20% des émissions en 2020, pour ensuite atteindre les 50% en 2050.
Le secteur des transports représente aujourd’hui à lui seul près 30% des émissions de CO2 nationales. C’est le premier secteur émetteur, devant le bâtiment ou la production d’électricité.
La loi va plus loin : jusqu’ici peu affectés, les transports vont devoir atteindre un seuil de part d’EnR fixé à 10% en 2020 et augmenté à 15% en 2030, pour réduire peu à peu l’utilisation des carburants fossiles conventionnels (essence, diesel) au profit des carburants « verts ».
La norme anti-pollution Euro6 va dans ce sens en imposant des contraintes de rejets de polluants afin de faire évoluer les véhicules pour diminuer leur impact sur la pollution.
Le GNV et le bio GNV : atouts, contraintes et développement
Le GNV est un gaz naturel utilisé comme carburant pour des véhicules à moteur thermique. Il peut donc se présenter sous la forme de gaz naturel comprimé ou bien liquéfié (respectivement GNC ou GNL) selon le réseau de distribution.
La technologie du GNV et son utilisation sont maîtrisées depuis des années, notamment sur les moteurs, avec un intérêt né dans les années 50 pour ce carburant comportant de nombreux avantages par rapport aux autres énergies.
Le GNV est économique, 20 à 30% moins cher que le diesel pour un véhicule à prix d’achat équivalent et écologique, réduisant de 23% les rejets de CO2 par rapport à un véhicule à essence, de 50% les émissions de NOx (oxydes d’azote) par rapport à la norme Euro6 et de 95% les émissions de particules fines par rapport à un véhicule diesel.
On parle aussi de bioGNV : mais qu’est-ce que le bioGNV ? C’est un carburant à base de biométhane, fabriqué localement dans des centrales de méthanisation à partir de déchets agricoles ou urbains. Les moteurs fonctionnant au GNV peuvent indifféremment être alimentés avec du bioGNV ou du GNV, la composition chimique étant identique : le véhicule s’adapte donc au gaz disponible à la pompe.
D’après l’ADEME (Agence de l’Environnement et De la Maîtrise de l’Energie), l’utilisation du biométhane comme carburant est une des valorisations les plus avantageuses, permettant de relever le défi de décarboner les transports avec moins 80% d’émissions de GES par rapport au diesel.
L’émergence du biométhane comporte beaucoup d’avantages pour le GNV
L’utilisation du biométhane dans les véhicules permet de réduire drastiquement les émissions de CO2 dans le transport pour les véhicules roulant au bioGNV, car ils consomment du gaz « vert » ou « renouvelable », dont le bilan carbone est quasi neutre.
De plus la consommation régulière et locale de biométhane, comme le permet le bioGNV, ajoute un atout économique et social en plus de l’avantage écologique, à l’échelle des territoires. La production de biométhane permet la création d’emplois locaux (environ 15 000 emplois directs et indirects) et d’une économie circulaire, sa consommation pour la mobilité étant locale et régulière.
Avec l’annonce du Directeur Général de GRDF de relever le défi des 30% de biométhane dans le réseau de distribution d’ici 2030, le GNV permettrait de dépasser la contrainte légale du seuil de 15% d’EnR dans les transports.
Enfin, les véhicules fonctionnant au GNV bénéficient d’une autonomie de 500 kms environ par plein, ce qui surpasse celle du véhicule électrique tout en offrant une part EnR similaire pour la mobilité avec le bioGNV. Ils constituent donc une alternative prometteuse aux véhicules conventionnels polluants.
Malgré ses nombreux atouts en tant que carburant d’avenir, le GNV ne peut être utilisé que dans un véhicule spécifique, avec souvent un moteur bicarburation (GNV et essence).
L’émergence du GNV dans les véhicules doit donc passer par une transformation du secteur automobile (présence des véhicules, du réseau et des stations de charge, expertise…), tout comme pour les véhicules électriques.
Aujourd’hui, la France est loin d’être la championne de l’automobile au GNV
On compte aujourd’hui 14 000 véhicules roulant au GNV sur le territoire, principalement dans les flottes de véhicules lourds (collectivités et transport routier), contre 19M dans le monde, soit 2% du parc mondial, avec en tête des pays comme l’Iran (3,5M de véhicules), la Chine et le Pakistan. En Europe, c’est l’Italie qui est le pionnier du GNV, avec 900 000 véhicules sur les 1,2M de l’Europe, occupant le 7ème rang mondial, loin devant l’Allemagne.
Au niveau des infrastructures, la situation en France est toute aussi critique (43 stations en 2016), malgré la progression remarquable depuis 2 ans avec l’ouverture de 40 stations en 2017 et 95 en 2018. Cela reste éloigné des 2 000 stations en Italie et en Allemagne.
L’objectif de l’Hexagone : atteindre les 250 stations en 2020 (150 stations publiques et 100 stations au service des territoires et centres urbains) et un scénario optimiste de la filière qui vise les 2 000 stations pour 2030 dont 40% au bioGNV, permettant d’éviter l’émission de 4,4 Mt de CO2.
Pour l’Europe, la directive européenne AFI demande aux états de définir leur plan de déploiement des stations, avec pour objectif un maillage permettant le bon ravitaillement des véhicules roulant au GNV (une station GNC tous les 150 kms et une station GNL tous les 400 kms).
Aujourd’hui, quelques barrières économiques et techniques restent à franchir pour que le bioGNV fasse une réelle percée dans le secteur des transports, mais ces défis sont connus et ne sont pas insurmontables.
Côté technique, il n’y a pas de défis technologiques au bioGNV : l’infrastructure réseau doit être développée pour permettre d’absorber l’injection décentralisée de biométhane (maillage et gestion des rebours) et les moteurs gaz doivent intégrer nos véhicules.
C’est sur le côté économique que l’on retrouve les véritables défis. Les secteurs biométhane et GNV représentent près de 400 M€ à investir d’ici 2020, mais un bénéfice à horizon 2030 estimé à 60 M€.
Avec l’évolution de la règlementation anti-pollution, le secteur gazier doit se tourner vers le gaz « vert » afin d’augmenter la part d’EnR de cette énergie. Cette étape est nécessaire pour la compétitivité et la pérennité de la filière gaz, dont l’impact sur l’environnement est crucial pour les émissions de GES.
COMMENTAIRES
Excepté pour de petites quantités quasiment négligeables devant les besoins, le biogaz vert est un leurre…
https://www.vive-le-nucleaire-heureux.com/blog-vive-le-nucleaire-heureux/79-les-offres-de-gaz-vert-kesako.html
Il n’est pas sûr du tout que le bioGNV ne pollue pas plus que le diesel … quant aux 80% de CO2 en moins, l’ADEME ne compte pas les épandages de digestats nécessaires, ni les fuites de méthaniseurs … le programme DIGES qu’ils utilisent prend des hypothèses de travail trop simplistes …
sincèrement
@CSNM9
Peut être un peu caricatural, mon propos, mais ne vaut-il pas mieux brûler le gaz dans les moteurs que dans les centrales thermiques pour recharger les voitures électriques (2 fois plus chères) ou des voitures à hydrogène (3 fois plus chères) en électrolysant de l’eau??? car tant qu’il ne sera pas obligatoire d’attendre qu’il y ait du vent pour recharger sa voiture, c’est ce qui se passera.