Climat : l’OCDE appelle les gouvernements à être plus ambitieux
Depuis 1995, la conférence des parties, plus communément appelée COP, permet d’inviter les acteurs de la communauté internationale à débattre des enjeux de la lutte contre le réchauffement climatique. La COP 23, présidée par les Îles Fidji, a pour objectif de préparer le premier bilan de l’Accord de Paris. Invité à s’exprimer à la veille de l’ouverture de ce grand rendez-vous international, le secrétaire général de l’OCDE Angel Gurria a appelé les gouvernements mondiaux à avoir une vision plus globale de leurs actions et à renforcer la réduction des émissions de dioxyde de carbone en coupant définitivement les subventions aux énergies fossiles polluantes.
Pour une vision internationale et non plus nationale
Le dernier rapport des Nations Unies est particulièrement pessimiste quant à la capacité de la communauté internationale à contenir la hausse des températures terrestres en dessous de 2°C d’ici la fin du siècle par rapport à l’ère préindustrielle. Les spécialistes du climat annoncent en effet un écart important entre les efforts à fournir pour atteindre cet objectif et les promesses faites par les pays du monde entier.
Angel Gurria déplore à ce titre un certain manque d’ambitions de la communauté internationale : les réductions d’émissions sur lesquelles se sont engagés les signataires de l’accord de Paris sur le climat permettront de limiter la hausse moyenne des températures de 2,6 à 3,1°C. Soit des chiffres plus élevés que l’objectif des 2°C. Le Secrétaire général de l’OCDE appelle donc les gouvernements à mettre en place des objectifs de réduction plus ambitieux et plus rapides.
« Où qu’ils soient émis, les gaz à effet de serre ont un impact mondial. Les programmes d’action étroitement nationaux ne sont pas adaptés à la lutte contre le dérèglement climatique mondial (…). À trop se focaliser sur le court terme et sur des intérêts nationaux étroits, on empêche une action efficace face aux émissions. En l’absence de vision et de détermination, toujours plus de pays risquent de se retrancher davantage sur leurs positions… Pourtant, nous pâtirions tous de ce sombre scénario ».
Les énergies fossiles dans le collimateur de l’OCDE
M. Gurria estime que c’est entre les mains des responsables gouvernementaux que se trouve la clef de la réussite. Malgré l’engagement des villes, des entreprises et des individus, le succès de la lutte contre le réchauffement climatique passe d’abord par l’action des gouvernements qui « devraient remédier aux incohérences entre les politiques économiques et climatiques et prendre des mesures pour stimuler l’investissement et l’innovation verts ».
L’OCDE appelle à une politique climatique ambitieuse, capable de stimuler la croissance et les investissements vers un monde résilient et sobre en carbone. La première pierre angulaire de cette nouvelle politique serait de stopper les subventions aux énergies fossiles, qui se chiffrent encore et toujours à quelques 500 milliards de dollars annuels, tout en travaillant à l’établissement d’un juste prix du carbone pour favoriser les technologies propres et décarbonées.
« Les gouvernements doivent fixer des prix du carbone qui reflètent progressivement le coût social mondial, et non simplement national, des émissions de CO2, et aligner leurs cadres d’action politiques, financiers et de planification pour parvenir à une croissance inclusive et respectueuse du climat (…). Les efforts d’atténuation du changement climatique convenus dans l’Accord de Paris seraient plus efficaces économiquement si l’on parvenait à une harmonisation des prix du carbone entre les pays. Un système d’échange de quotas d’émission pleinement international pourrait diviser par deux le coût des réductions d’émissions promises ».
Le secteur pétrolier en danger
Les arguments d’Angel Gurria trouvent écho dans une étude du groupe de réflexion Carbon Tracker. Dans un rapport publié à la veille de l’ouverture des débats de la COP23, les membres de ce think tank expliquent que les objectifs mondiaux de réduction des émissions de CO2 entraîneront une baisse de 23% la production de pétrole au cours des 15 prochaines années. De fait, un quart des équipements de raffinage ne seront plus viables économiquement d’ici l’horizon 2035.
« Si l’on parvient à limiter le réchauffement climatique à 2°C, le secteur du raffinage souffrira beaucoup plus que celui de la production, puisque cela générera des surcapacités structurelles et un environnement de marges faibles dont la seule issue serait une réduction soutenue des capacités », explique Alan Gelder, vice-président chargé de la recherche de Wood MacKenzie.
Les conclusions de l’étude de Carbon Tracker sont basées sur les statistiques du cabinet Wood MacKenzie et l’analyse de l’activité de 492 raffineries (94% des capacités mondiales). La baisse de la demande en pétrole entrainera donc une diminution de moitié de la valorisation économique du secteur pétrolier. Les bénéfices des groupes devraient donc eux aussi diminuer de moitié (soit 147 milliards de dollars en 2015).