Les politiques énergétiques sont insuffisantes pour lutter contre le réchauffement climatique
L’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) a rendu public son World Energy Outlook, une étude consacrée aux grands enjeux énergétiques mondiaux.
Les experts de l’organisation internationale profitent de cette publication pour mesurer l’impact des politiques énergétiques sur le long terme.
Un exercice qui trouve tout son sens à quelques jours de l’ouverture de la COP25 à Madrid.
Pour l’AIE le constat est en effet simple : sans un sursaut de la communauté internationale et la mise en place de mesures ambitieuses, la catastrophe climatique ne saura être évitée. Explications.
De l’inefficacité des politiques actuelles
Les conclusions de l’édition 2019 de World Energy Outlook sont sans appel : sans un changement rapide et généralisé du système énergétique mondial, les objectifs de l’Accord de Paris pour le climat ne seront jamais atteints. Si l’on se fie aux trois scénarios prospectifs, les politiques actuelles vont en effet être insuffisantes pour contenir la hausse des températures planétaires en-dessous de 2°C.
Dans son premier scénario, l’AIE mise sur le maintien des politiques énergétiques actuelles. Que se passerait-t-il si les États poursuivent leurs actions climatiques telles qu’elles sont définies à l’heure actuelle, sans en rehausser leurs ambitions ? La réponse des auteurs du rapport est simple : la demande mondiale d’énergie va continuer de progresser à hauteur de 1,3% par an, provoquant une hausse constante des émissions de gaz à effet de serre.
« L’avenir présenté dans ce scénario est encore loin de l’objectif d’un avenir énergétique sûr et durable. Il décrit un monde en 2040 où des centaines de millions de personnes n’ont toujours pas accès à l’électricité, où les décès prématurés liés à la pollution demeurent au-dessus du niveau élevé d’aujourd’hui et où les émissions de CO2 auraient pour effet de verrouiller les graves conséquences du changement climatique », peut-on lire dans le World Energy Outlook 2019.
De la difficulté de se débarrasser des énergies fossiles
Dans son deuxième scénario, l’AIE part du principe que la communauté internationale respecte ses engagements en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Les calculs prévisionnels des experts de l’agence internationale se basent sur l’application concrète des politiques énergétiques formulées par les gouvernements du monde entier.
Les résultats ne sont guère encourageants. Comme pour la première hypothèse de travail, les prévisions de l’AIE tendent à démontrer que la demande en énergie continuerait à augmenter à hauteur de 1% par an jusqu’en 2040.
Conséquence logique de cette tendance : une hausse plus lente mais tout aussi inéluctable des émissions mondiales de CO2, malgré le développement des énergies renouvelables.
Dans ce scénario, l’AIE estime en effet que les énergies fossiles gardent une place prépondérante dans le mix énergétique mondial, notamment en raison de l’exploitation des hydrocarbures de schiste aux États-Unis. Selon les prévisions, les énergies fossiles polluantes représenteront encore 74% de la consommation mondiale d’énergie primaire d’ici 2040.
« La révolution du schiste souligne que des changements rapides dans le système énergétique sont possibles lorsqu’un effort initial pour développer de nouvelles technologies est complété par de fortes incitations de marché et des investissements à grande échelle. Les effets ont été frappants, le schiste américain constituant désormais un contrepoids puissant aux efforts de gestion des marchés pétrolier », explique l’AIE.
De l’importance de l’efficacité énergétique
C’est dans le cadre de son troisième et dernier scénario que l’AIE fait preuve d’optimisme et mise sur l’atteinte des objectifs de l’Accord de Paris.
Ce scénario se base sur le déploiement de technologies actuelles pour contenir à 2°C la hausse des températures. Ce détail permet à l’AIE de souligner l’importance déterminante de la volonté politique des gouvernements et des entreprises du monde entier : en d’autres termes, nous pouvons dès à présent adapter le système énergétique mondial et freiner la hausse de températures.
Pour y parvenir, l’AIE estime en premier lieu qu’il est nécessaire de développer les sources d’énergies décarbonées, et notamment le solaire et l’éolien, pour compenser la hausse de la consommation mondiale d’électricité (seule énergie dont la demande s’inscrit à la hausse sur le long terme).
Mais le déploiement d’infrastructures de production d’énergie renouvelable ne sera pas suffisant en l’état : les auteurs du rapport soulignent en effet l’importance de l’efficacité énergétique dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique.
Le message de l’AIE est identique à celui de son rapport publié le 4 novembre dernier : il faut faire progresser de 3% par an l’efficacité énergétique pour réussir la transition énergétique mondiale.
« Le monde doit de toute urgence veiller à réduire les émissions de manière globale. Cela appelle une grande coalition comprenant des gouvernements, des investisseurs, des entreprises et tous ceux qui sont déterminés à lutter contre le changement climatique », estime le directeur exécutif de l’AIE, Fatih Birol.
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