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« Le pragmatisme a guidé les choix de la PPE »

Au lendemain de l’annonce de la feuille de route de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), nous avons voulu décrypter les grandes lignes du discours du président Macron.

Eclairage d’Emmanuel Autier, Associé chez BearingPoint, société de conseil.

La feuille de route de la PPE a enfin été dévoilée. Pourquoi selon-vous Emmanuel Macron ne souhaite pas renoncer au nucléaire ?

Tout simplement parce que le président de la République est pragmatique, et parce que contrairement à ce que beaucoup, pour des raisons dogmatiques, pensent ou annoncent, transition énergétique et lutte contre les gaz à effet de serre ne veut pas dire sortir de l’énergie nucléaire.

Et au contraire, sortir du nucléaire trop rapidement est contradictoire avec les objectifs que nous nous fixons dans la lutte contre le réchauffement climatique qui est la vraie urgence absolue.

Aujourd’hui, le nucléaire c’est certes une industrie particulière, une industrie de temps long, une industrie qui doit gérer la question de la sûreté, du cycle des déchets, de la déconstruction des sites.

Et parallèlement, c’est une industrie décarbonée et qui a, à mon sens, toute sa place dans une transition énergétique qui vise, dans un premiers temps, et c’est le principal objectif, à lutter contre les émissions de gaz à effet de serre et donc à lutter contre le réchauffement climatique. Sortir du nucléaire, c’est se priver de ce moyen massif de production d’électricité totalement décarbonée et donc une erreur et un dogmatisme primaire.

Le nucléaire a sa place dans une transition énergétique économiquement réalisable.

Le nucléaire reste donc pour vous une filière d’avenir ? L’EPR a-t-il sa place dans le mix énergétique ?

Oui. Je pense qu’il ne faut pas juger l’EPR à l’aune de sa première tête de série. Si l’on regarde le temps qu’il faut pour concevoir, construire, exploiter pendant 60 ou 70 ans puis déconstruire, on parle d’un siècle.

Dans 20 ou 30 ans, lorsque nous aurons construit d’autres réacteurs EPR pour fermer des vieux réacteurs, les vicissitudes du tout premier réacteur EPR qu’est Flamanville seront oubliées car nous aurons un effet série, un effet pallier et du coup cette capacité à exploiter de façon encore plus sûre des objets industriels qui nous seront très utiles.

L’EPR de Taishan en Chine, en service depuis cette année, démontre la faisabilité industrielle.

Vous parlez de pragmatisme. Est-ce que le coût du kW n’est pas en réalité le cœur du sujet à l’heure où l’on parle du prix de l’énergie ?

C’est question est importante. Avoir une énergie rentable, à un coût qui soit pas insupportable pour les ménages ou les industriels qui leur permet d’être compétitifs car gros consommateurs d’énergie, et exploiter au maximum des objets industriels amortis pour produire de l’électricité à un coût du niveau actuel avec le parc existant, cela serait dommage de s’en priver !

La question, c’est pourquoi s’en priver ? S’en priver parce que le nucléaire c’est mal ? J’ai du mal à comprendre les arguments de ceux qui disent il faut sortir du nucléaire car le nucléaire est dangereux.

Or, le nucléaire n’est pas plus dangereux que les mines de charbon que nous exploitions à leur rendement maximum. Il existe des peurs irrationnelles avec le nucléaire. Il faut savoir que le nucléaire est très responsable dans sa gestion de la sûreté, et contrôlé par l’ASN, un organe indépendant.

Il serait dommage pour des mauvaises raisons de se priver d’une énergie volumineuse, décarbonée et à coût raisonnable.

D’autant que le nucléaire est une filière d’excellence. Je pense que les choix qui ont été faits de séparer les activités d’Orano, de rapprocher celles de Framatome et celles d’EDF de façon à mieux consolider cette filière d’excellence est de nature à participer à cette nouvelle génération de réacteurs plus sûrs en France et à aider des pays comme l’Inde ou la Chine, qui sont des pays très émetteurs, à remplacer progressivement leur production d’énergie fossile. C’est un besoin vital pour la planète.

La fin annoncée des centrales à charbon en France est-elle réalisable ?

Oui, je pense qu’on peut et surtout qu’on doit le faire. Avec la fermeture de ces centrales, on répond effectivement au vrai objectif qui est la lutte contre la hausse des émissions de GES. Toutes les mesures qui visent à lutter contre le réchauffement climatique sont des bonnes mesures. Après, il ne faut pas le faire n’importe comment en accompagnant les territoires.

Je relève un paradoxe : on dit d’un côté qu’il faut supprimer le diesel, l’essence et développer massivement la voiture électrique, mais de l’autre on demande la fin du nucléaire…

Se greffe ainsi la question du stockage qui va pouvoir nous emmener sur des échelles plus importantes sur la filière des renouvelables. Quand le stockage sera économiquement et énergétiquement efficient, nous pourrons imaginer des modèles et paradigmes différents.

Emmanuel Macron a également annoncé une accélération du déploiement des énergies renouvelables. Si l’éolien et le solaire sont les grands gagnants, l’éolien offshore semble un peu mis sur la touche. Comment l’expliquez-vous ?

Il y a peut-être encore un réalisme économique dans les choix qui ont été faits. Entre le solaire, l’éolien terrestre et l’éolien en mer, le président s’est posé la question de savoir où il était judicieux de mettre l’argent public. Il mise ainsi sur les énergies pour lesquelles le prix au kW sorti de l’installation est le plus pertinent pour ne pas alourdir de façon insupportable le coût moyen. L’éolien offshore, aujourd’hui, cela reste encore un cout kW sorti de l’installation qui est beaucoup plus élevé que l’éolien terrestre ou le solaire.

Les professionnels de l’éolien offshore vous répondraient que tant qu’on ne développe pas une filière, les prix ne peuvent pas baisser…

Nous sommes d’accord. Mais cela prendra du temps et les choix qui ont été faits sont des priorités à court terme pragmatiques. L’éolien est contributeur à la création d’emploi en France, le développement de l’éolien offshore devant venir renforcer les capacités de développement de l’éolien terrestre dans notre pays.

commentaires

COMMENTAIRES

  • « Or, le nucléaire n’est pas plus dangereux que les mines de charbon que nous exploitions à leur rendement maximum. »
    prétend ce Monsieur !!
    Je ne comprends pas, pourrait-il donner quelques exemples ?

    Répondre
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