principal poste energetique dans piscine couverte est traitement air - Le Monde de l'Energie

« Le principal poste énergétique dans une piscine couverte est le traitement de l’air »

Le Monde de l’Énergie ouvre ses colonnes à Sophie Potier, coordinatrice régionale du programme ACTEE (« Action des collectivités territoriales pour l’efficacité énergétique »), pour évoquer avec elle la consommation énergétique d’une piscine municipale.

Le Monde de l’Énergie —Quelle est la place des piscines municipales dans la consommation énergétique des communes de France, en particulier pour les équipements les plus anciens ? Quels sont les plus importants postes de dépense énergétique pour ces équipements ?

Sophie Potier —Une piscine peut représenter environ 10% de la consommation énergétique totale d’une commune (environ 3% pour une commune de moins de 10 000 habitants, 6% pour une commune entre 10 000 à 50 000 habitants et 15% pour une commune de plus de 50 000 habitants) et jusqu’à 30%-40% de la consommation énergétique pour les groupements à fiscalité propre. Avec une moyenne comprise entre 2500 et 3000 kWh/m² de plan d’eau/ an consommés pour une piscine, ces sites apparaissent comme parfois 10 fois plus consommateurs qu’un bâtiment tertiaire « classique ».

En France, on compte environ 4 000 piscines publiques et 6 412 bassins. Environ 60 % de ces piscines ont plus de 40 ans. En effet, plus de la moitié des équipements aquatiques ont été construits avant 1977, dans le cadre notamment de la mise en œuvre du plan national « 1 000 piscines », défini à la fin des années 60. Dans ce contexte, la rénovation ou la reconstruction d’équipements concerne un nombre important de collectivités qui sont aujourd’hui propriétaires d’équipements vieillissants, ne répondant plus aux normes de sécurité, d’hygiène ou tout simplement aux nouvelles attentes du public.

Le principal poste énergétique dans une piscine couverte est le traitement de l’air. L’équilibre thermique entre l’air du hall du bassin et l’eau est important à trouver pour ajuster au mieux l’installation de traitement de l’air. Tout problème de qualité d’air ou de qualité d’eau va engendrer des surconsommations énergétiques. Assécher l’air ambiant va augmenter l’évaporation et la consommation au niveau du bassin : il est estimé qu’une baisse de 5% d’humidité relative entraîne une augmentation de 42 W/ m2 de plan d’eau (environ 155 kWh/an.m2 de plan d’eau pour une ouverture hebdomadaire de 75 heures). Pour des conditions d’ambiance identiques, une augmentation de 1°C de la température d’eau entraine une surconsommation d’environ 7 kWh/m2 plan d’eau.

Le Monde de l’Énergie —Comme pour les logements, des travaux de rénovation peuvent permettre de réduire cette consommation. Quelles sont les principaux ? Ce type de travaux peuvent-ils s’avérer rentables, et, si oui, à quelle échéance ?

Sophie Potier —Deux approches, complémentaires, sont possibles, en fonction des budgets disponibles. On peut obtenir des résultats immédiats sans gros investissements, avec des efforts de sobriété et d’efficacité énergétique. Une rénovation complète, associée à des énergies renouvelables, peut générer jusqu’à 80 % de réduction des consommations.

Les mesures immédiates incluent le nettoyage des bouches de régulation d’air et la calorifugation des tuyaux, bâcher les bassins extérieurs la nuit, diminuer la température des bassins d’un degré, et regrouper les plages d’utilisation. Ces actions permettent des économies d’énergie de 10 à 20 % rapidement, sans gros investissements. Le suivi régulier des consommations permet également de détecter les potentiels défaillances. Renégocier les contrats de fourniture d’énergie peut également réduire les coûts.

D’autres interventions, comme l’installation d’une centrale de ventilation double flux pour récupérer la chaleur de l’air évacué, peuvent générer des économies significatives. Remplacer les luminaires par des LED permet aussi des gains substantiels.

Le changement des systèmes de filtration d’eau, activés par des pompes, est également une action à gain rapide et important. Les filtres sables nécessitant notamment de fortes consommations d’eau pour leur contre-lavage, peuvent être remplacés par des filtres à billes de verre ou membranes céramiques, moins énergivores. L’installation de pompes à débit variable, permettent notamment d’adapter le renouvellement de l’eau à la fréquentation du bassin est également une action simple et rentable.

Avec une rénovation complète, forcément plus longue et plus onéreuse, on peut espérer de 60 à 80 % de réduction des consommations. Cela inclut l’installation de double vitrage, l’amélioration de l’isolation de l’enveloppe du bâtiment et l’ajout de systèmes de production d’énergies renouvelables, comme des panneaux solaires. Parmi les travaux plus importants, la réduction de la profondeur des bassins permet de baisser sa consommation d’eau et donc d’énergie associée à son chauffage. Ces rénovations répondent aux exigences du décret tertiaire de 2019, qui impose une réduction de 60 % de la consommation énergétique des bâtiments tertiaires de plus de 1000 m² d’ici 2050.

Le Monde de l’Énergie —Des aides et soutiens publics existent-ils pour ces travaux de rénovation ?

Sophie Potier —Le coût des travaux d’efficacité énergétique peut varier de quelques dizaines de milliers, dans le cas d’une intervention d’optimisation des équipements, à plusieurs millions d’euros pour une rénovation lourde. Dans ce dernier cas, il est crucial de garantir l’efficacité des investissements.

Une grande variété d’aides est mobilisable, telles que le Fonds Vert, le Fonds Chaleur pour les systèmes de chauffage à énergie renouvelable, mais aussi des aides européennes et régionales. Des aides de l’ANS (Agence Nationale du Sport) peuvent également être sollicitées pour les plus gros projets de restructuration. L’enjeu sera de les mobiliser efficacement, en justifiant des économies d’énergie qui seront réalisées. Or, les collectivités ne disposent que rarement des compétences en interne pour savoir quels travaux mener, ni pour piloter ces chantiers de rénovations. Des études permettent d’établir un état des lieux, d’analyser les consommations d’énergie et d’eau et d’identifier les pistes d’action.

En amont des travaux, il est possible de bénéficier d’un accompagnement pour de l’ingénierie. Le programme ACTEE pourra ainsi financer la création de postes d’économes de flux, des experts qui accompagnent les collectivités dans leurs démarches d’économies d’énergie. Le programme finance aussi des études : les audits techniques, permettant d’analyser les postes de dépenses en énergie et en eau, l’enveloppe du bâtiment, et fournir des recommandations. Mais aussi des prestations de Maîtrise d’Œuvre (MOE), et d’Assistance à Maîtrise d’Ouvrage (AMO), soit un accompagnement technique, financier, juridique des collectivités en phase travaux pour s’assurer la fiabilité des rénovations, ainsi que des outils de suivi des consommations énergétiques.

Ces travaux peuvent s’avérer rentables. Les économies générées par des mesures de sobriété et d’efficacité énergétique peuvent être constatées quasi immédiatement. Pour les rénovations complètes, l’investissement initial peut être compensé par les économies d’énergie réalisées sur le long terme, souvent dans un délai de quelques années. En somme, la rentabilité et la durée de retour sur investissement varient selon l’ampleur des travaux, mais les résultats sont généralement positifs et significatifs.

Afin de s’assurer de l’atteinte des objectifs énergétiques, la mise en place de Contrat de Performance Energétique est particulièrement adaptée aux équipements sportifs qui sont par nature complexe. Le programme ACTEE peut financer de l’AMO pour la mise en place de tels marchés.

Le Monde de l’Énergie —Au-delà des piscines, comment les communes et communauté de communes travaillent-elles à améliorer leur efficacité énergétique ? Les hausses des prix de l’électricité et du gaz en 2022-2023 ont-elles eu un effet accélérant pour ces initiatives ?

Sophie Potier —Les communes et communautés de communes s’efforcent d’améliorer leur efficacité énergétique à travers diverses initiatives, associant sobriété, efficacité énergétique et rénovation. Le décret éco-énergie tertiaire impose une réduction de 40 % des consommations énergétiques pour les bâtiments publics de plus de 1000 m² à horizon 2030, et 60 à horizon 2050. Cette obligation pousse les collectivités à entreprendre des rénovations énergétiques pour leur patrimoine bâti, qui totalise environ 260 millions de m², dont 140 millions de m² de bâtiments scolaires.

Cependant, seules les grandes communes ont les capacités techniques et financières pour évaluer et réaliser ces rénovations. Les petites communes, représentant 97 % des 34 500 communes françaises, manquent d’ingénierie propre et doivent recourir à des ressources mutualisées. Les syndicats d’énergie et les groupements de communes, comme les EPCI, jouent un rôle crucial en accompagnant ces petites communes dans les audits énergétiques, la maîtrise d’ouvrage et la recherche de financements.

Au-delà de l’aspect réglementaire, la rénovation énergétique des bâtiments publics est également une réponse à l’urgence écologique, le secteur du bâtiment représentant 43 % des consommations énergétiques et 23 % des émissions de GES en France, mais aussi une nécessité économique. Depuis 2021, les coûts énergétiques des collectivités ont été multipliés par deux à trois, exacerbant la crise budgétaire et menaçant le maintien des services publics.

Les hausses des prix de l’électricité et du gaz en 2022-2023 ont effectivement accéléré ces initiatives, en soulignant l’urgence de réduire les dépenses énergétiques pour équilibrer les budgets locaux. En réponse, de nombreuses collectivités ont intensifié leurs efforts pour engager des projets de rénovation énergétique, conscients des économies substantielles que ces travaux peuvent générer à long terme. D’autant que ces rénovations sont aussi un enjeu de service public, puisqu’elles améliorent le confort des usagers.

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