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Union européenne : assurer un niveau satisfaisant de répression des infractions environnementales

Une tribune signée Anne Petitjean, avocate associée Real Estate et Jean-Baptiste Verlhac, avocat Real Estate au sein du Cabinet Herbert Smith Freehills à Paris.

 

Le 11 avril 2024, le Parlement et le Conseil européens ont adopté la nouvelle directive relative à la protection de l’environnement par le droit pénal1.

Cette directive remplace celle du 19 novembre 20082 qui, après plus de dix ans d’application, avait été jugée insuffisante par les institutions européennes pour assurer un niveau satisfaisant de répression des infractions environnementales au sein des États membres.

La directive du 11 avril 2024 consolide et renforce donc le cadre juridique européen existant sur plusieurs aspects :

La création de nouvelles infractions environnementales

L’article 3 de la directive crée de nouvelles incriminations environnementales en portant leur nombre total à vingt, contre neuf sous l’empire de la directive de 2008.

Ces incriminations nouvelles couvrent un large nombre de comportements illicites impliquant une atteinte à l’environnement, tels que les infractions graves à la législation sur les produits chimiques, les captages d’eaux illégaux causant des dommages à l’environnement, le recyclage illégal de composants polluants des navires ou encore le trafic de bois.

Pour la plupart d’entre elles, la directive précise que ces infractions sont non seulement caractérisées si elles résultent d’un acte intentionnel, mais également d’une négligence d’une particulière gravité, ce qui élargit le champ des comportements répréhensibles.

La directive crée, en outre, des infractions « qualifiées », entraînant l’application de sanctions plus sévères, lorsque les infractions listées à l’article 3 sont commises intentionnellement et entraînent la destruction d’un écosystème ou des dommages irréversibles ou durables à l’environnement.

Même s’il n’est pas explicitement nommé, cet ajout consacre ainsi la reconnaissance implicite du délit d' »écocide » en droit pénal environnemental européen.

Le durcissement des peines applicables aux infractions environnementales

La directive du 11 avril 2024 prescrit aux États membres l’application de peines d’emprisonnement maximale d’au moins cinq ans pour la commission des infractions environnementales listées à l’article 3.

La peine d’emprisonnement sera portée à huit ans en cas de commission d’une infraction qualifiée, et à dix ans pour certaines infractions intentionnelles causant le décès d’une personne.

Concernant les peines applicables aux personnes morales pour les infractions environnementales les plus graves, la directive prévoit que les États membres devront fixer une peine d’amende dont le montant maximum ne pourra pas être inférieur soit à 5% du chiffre d’affaires total de la personne morale, soit à 40 millions d’euros.

Pour toutes les autres infractions, les États membres devront fixer une peine d’amende dont le montant maximum ne pourra pas être inférieur soit à 3% du chiffre d’affaires total de la personne morale, soit à 24 millions d’euros.

Dans tous les cas, les États membres conserveront la liberté de prévoir des peines plus sévères.

De plus, la directive prescrit aux États membres de prévoir des peines complémentaires, applicables aux personnes physiques et aux personnes morales, consistant notamment en l’obligation de réparer les dommages causés à l’environnement ou de les indemniser, l’exclusion de l’accès au financement public ou le retrait des permis ou autorisations accordés aux entreprises ou aux porteurs de projet auteurs de l’infraction.

Le renforcement des moyens de lutte contre les infractions environnementales

En dehors des sanctions pénales, la directive prévoit des mesures visant à améliorer la lutte contre les infractions environnementales.

Elle prescrit ainsi aux États membres la création de mesures de protection des lanceurs d’alerte en matière d’infractions environnementales, ou encore la garantie d’un droit au recours et à une information suffisante sur les procédures en cours pour les victimes d’infractions environnementales et les ONG.

Elle renforce également les obligations des États membres en matière de coopération pour la lutte contre les infractions environnementales et leur prescrit l’obligation d’établir une stratégie nationale de lutte contre les infractions environnementales d’ici au 21 mai 2027.

Transposition de la directive en droit français

Les dispositions de la directive doivent être transposées par les États membres dans leur droit national d’ici au 31 mai 2026.

L’exercice de transposition de la directive en droit français devrait être toutefois d’ampleur limitée dans la mesure où un bon nombre des dispositions de la directive existent d’ores et déjà en droit français 3.

Toutefois, des mesures telles que la généralisation de la négligence grave comme élément constitutif des infractions environnementales ou encore le renforcement des moyens européens de lutte contre les infractions environnementales constituent des mesures nouvelles qui permettront de compléter le droit interne existant et d’accroître ainsi la protection de l’environnement.

 

1Directive (UE) 2024/1203 du Parlement européen et du Conseil du 11 avril 2024 relative à la protection de l’environnement par le droit pénal et remplaçant les directives 2008/99/CE et 2009/123/CE.

2Directive 2008/99/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative à la protection de l’environnement par le droit pénal.

3En particulier, la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « Climat et résilience », a relevé les seuils de plusieurs sanctions et incriminé l’écocide et le risque environnemental.

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